Quels liens entre spiritualité et racisme
La semaine contre le racisme devient islamo-surréaliste. Vendredi, la mosquée de l’islamiste Hani Ramadan 1) organisait un échange avec une brochette de personnalités du monde religieux, dont beaucoup sont membres de la Plateforme interreligieuse. 2) Samedi, c’était au tour de la mosquée saoudienne genevoise de parler islam et laïcité, toujours dans ce cadre de l’antiracisme, selon la définition qu’en donnent désormais les intégristes et leurs compagnons de route.
Qu’en est-il du racisme des ressortissants des Balkans et d’autres populations immigrées envers les Noirs? Du racisme des Noirs entre eux? Du racisme anti-Blancs? De l’intolérance des croyants musulmans à l’égard des autres religions? Oubliez! L’axiome de base de ces semaines, c’est que seuls les blancs d’origine qui biberonnent à l’antiracisme dès leur naissance et qui ont intégré des millions d’immigrés de toutes origines deviennent racistes. C’est un grand mystère…
Public musulman
Question racisme, le thème de la soirée de ce vendredi était encore plus mystérieux : «Quels liens spirituels entre les êtres humains dans une société laïque?»
Dans le public, une écrasante majorité de femmes portent le foulard. J’en déduis -les hommes étant exonérés du marqueur – que le public masculin est aussi musulman .
Premier sentiment d’étrangeté: Hani Ramadan ouvre la soirée en arabe. Une bonne partie de la documentation étalée sur la table est aussi dans cette langue.
André Castella, Délégué à l’intégration, se dit très préoccupé par la «montée des extrêmes», phénomène qu’il illustre ainsi: «Certains disent aujourd’hui vouloir une Europe blanche et chrétienne.» Quelle horreur!
Mais beaucoup plus disent vouloir une Europe musulmane et régie par la charia. Quel bonheur?
Le sondage paru dans Le Monde la veille où les trois quarts des Français estiment que l’islam est intolérant et qu’il est incompatible avec les valeurs de la République suggère cette seule réflexion au délégué: «Il faut que ce chiffre baisse!»
La prière avant la Table
Durant les présentations, assez confuses, les sept dialogueurs n’ont que bonnes paroles les uns envers les autres: respect, compatibilité entre spirituel et laïcité, acceptation de l’autre «quels que soient ses traditions, son habillement sa façon de prier…»
Hafid Ouardiri est en souffrance. «Pour moi, la laïcité est un pilier. Mais je suis taxé d’ennemi de cette laïcité!» Il a mal aussi devant l’interdiction des minarets, la hausse de l’islamophobie, et réclame une «acceptation positive de toutes les différences culturelles et éthiques». Claire Regad le rassure: les catholiques «considèrent avec respect et estime les règles des autres religions.» Quant à Jean-Claude Mokry, il remercie les amis musulmans d’avoir interrompu la manière ronronnante dont les chrétiens percevaient la laïcité.
A ce moment, Hani Ramadan réveille les ronronnants et nous prouve que nous ne sommes vraiment plus dans le même univers: Table ronde ou non, hôtes ou pas, il est l’heure de la prière. Dix minutes d’interruption! Je me demande ce que feront ces croyants obsessionnels quant ils occuperont, en nombre, d’importantes fonctions (conseillers d’Etat, juges, travailleurs sociaux, policiers…) Peut-on imaginer qu’ils puissent privilégier l’intérêt public et pas celui de leurs frères et sœurs en islam?
Le moment des questions arrive. Je me lance. «Les musulmans prennent de plus en plus de place dans ces semaines antiracistes. Or, les musulmans ne sont pas une race.» André Castella rectifie: «Les races n’existent pas, mais le racisme oui. Le racisme anti-frontaliers, le racisme anti-musulman …»
A quand la lutte contre le racisme anti-femme?
Sceptique sur le moment, je me rallie aujourd’hui à cette nouvelle définition. Et je propose que le racisme anti-femmes soit à l’ordre du jour de la prochaine semaine d’actions. Il y a beaucoup à dénoncer: extension de revendications misogynes, volonté de contrôler le corps et la sexualité des femmes, demandes de suppression de la mixité, de dispenses de natation, de certificats de virginité, de réfection d’hymens…
Je questionne aussi les dialogueurs sur les débats de leur plate-forme, puisqu’ils paraissent si bien s’entendre. (Rappelons par exemple que pour l’islam, les chrétiens ont falsifié leurs textes, qui étaient musulmans, et que 17 fois par jour dans leurs prières, les musulmans les qualifient d’«égarés»). J’exprime mon étonnement qu’aucun orateur chrétien n’ait évoqué les dramatiques persécutions que subissent leurs coreligionnaires dans les pays musulmans. Je fais remarquer que le commentateur du sondage du Monde, le musulman Abdennour Bidar, affirme que proclamer que l’islam n’a rien à voir avec le terrorisme est ubuesque. A propos de cette hostilité qui monte en Europe, j’interroge les musulmans sur leur absence totale d’autocritique. Et sur le fait qu’ils semblent se rallier à la laïcité, alors que pas une seule nation islamique n’est devenue laïque, ni ne reconnaît la liberté religieuse… » Enfin, je m’élève contre l’avis trois fois énoncé qu’il faut accepter toutes les cultures et traditions. Personnellement, je n’accepte pas, par exemple, celles qui traitent les femmes en inférieures… »
(là, on m’enlève -avec raison- le micro…)
Les moments exquis de l’autocritique chrétienne
Les orateurs condamnent mes propos. Les chrétiens m’indiquent que le dialogue religieux ne va pas de soi, «notamment avec les fondamentalistes évangéliques», que «la séparation de l’Eglise et du temporel a pris des siècles», qu’il faut «travailler là où on est, car on n’a aucun moyen de faire changer quelque chose là-bas». L’un d’eux se félicite au passage de n’être pas «impliqué dans cette période affreuse des Croisades…»
J’envie alors les moments exquis que vivent les leaders musulmans lors de ces débats. Le miel qui coule dans leurs oreilles à l’écoute du rappel incessant par les athéo-chrétiens de leurs vilaines actions passées, présentes, et sûrement à venir. Or, jamais un religieux musulman ne fait la moindre autocritique. Cette soirée ne fera pas exception: aucun d’entre eux ne prendra la peine de répondre à l’un de mes reproches.
André Castella, lui, s’enthousiasme : «Nous sommes là. C’est extraordinaire! Au lieu de s’envoyer des bombes, on s’envoie des paroles!»
Euh… Juste une précision Monsieur le Délégué : ailleurs, où ce débat entre chrétiens et musulmans n’existe pas, qui envoie les bombes?
L’islam ne connaît pas la laïcité et ça ne changera pas!
Hani Ramadan, lui, ne se sent aucunement tenu de slalomer pour ne pas blesser ses hôtes: «L’islam ne connaît pas la laïcité. Ici, les musulmans ont une prise de conscience qui leur permet de s’intégrer. Mais dans un débat de civilisations, on doit dire que le shéma de l’Occident n’est pas celui de l’islam. Il faut connaître la charia de l’intérieur et se demander si on peut intégrer la laïcité. Si l’on considère l’Occident, la laïcité est-elle la meilleure voie ? La perte de valeurs, de repères…»
Bref, tant que les musulmans vivent dans des sociétés dont le pouvoir leur échappe, il leur faut profiter des incroyables libertés qu’elles leur offrent pour étendre leur emprise. Mais dès qu’il sera possible de créer une société islamique, bonjour la charia et adieu libertés et laïcité!
Une courtoisie à relever
Le débat a été très courtois. Malgré les tentatives de changer de sujet, les questions me revenaient souvent: «Avez-vous lu le Coran? Avez-vous compris ce qu’il dit? En Lybie, une communauté d’Italiens chrétiens vivent sans la moindre persécution…» «Comment pouvez-vous affirmez que le Coran condamne les autres religions?» (je ne me souviens à vrai dire pas très bien de cette question, seulement de ma réponse : «J’ai avec moi un livre dans lequel j’ai recopié une trentaine de versets qui incitent à combattre les non-musulmans. Voulez-vous que je vous les cite?» Mon interlocuteur décline.) Plusieurs jeunes gens ont voulu poursuivre la discussion après la table ronde. Tellement assurés de la perfection de l’islam et du Coran qu’ils ne désespéraient pas de m’en convaincre.3)
En fin de compte, je me demande à quoi servent ces incursions chez mes adversaires (musulmans fondamentalistes et compagnons de route) vu qu’aucune ligne jamais ne bouge. A rédiger un papier de blog?
1)Au nom de l’Union des organisations musulmanes de Genève (UOMG) dont il est président
2)Swami Amarananda, Centre Védantique ; Henri Maudet, protestant ; Hélène Quelen et Jean-Claude Mokry, Église catholique chrétienne ; Hafid Ouardiri, Fondation pour l’Entre-connaissance, Claire Regad, Église catholique romaine.
3)A ce propos, une jeune femme m’a donné son adresse e-mail pour poursuivre le débat entre quatre yeux, mais j’ai égaré le papier. Si par hasard elle lit ce blog, elle serait aimable de me renvoyer ses coordonnées.