John Goetelen, mon meilleur blogueur

«Un homme libre s’en est allé sur la pointe des pieds à l’âge de 75 ans.»

Tel est le texte succinct annonçant la mort John Goetelen, blogueur étincelant et sensible, subtile et curieux. De ceux, rares, qui joignent le cœur et la raison et le doute aux convictions.

Il s’est découvert un bonheur d’écriture et de réflexion dont la Tribune de Genève a bénéficié durant une quinzaine d’années. Des milliers de lecteurs, qui le connaissaient aussi sous l’appellation de « Homme libre », l’ont attendu, apprécié, commenté. Il était de loin le plus lu de cette plate-forme de liberté.

Mercredi, lors du moment de recueillement qui scellait la séparation, une grande partie des participants étaient des élèves de l’École de soins naturels qu’il avait créée, dont plusieurs l’ont suivi en étudiants, en lecteurs et en amis.  Le dernier commentaire de l’un d’eux: «Tu auras été mon prof, mon patron, mon mentor, et enfin mon ami. Merci pour tout ce que tu m’as apporté.»

J’avoue avoir découvert sa signature avec quelques préventions: je l’ avais vaguement connu lorsque j’étais journaliste à la Tribune de Genève, méfiante envers son  activité en faveur de la naturopathie. Méfiance d’ignorante (qui l’est toujours). J’ai cru aussi au début qu’il diffusait et revendiquait une part de misogynie (je me suis beaucoup familiarisée avec lui aux «misandres»). J’ai vite compris mes égarements.

Polyvalent, il a fait partager sa passion pour la météorologie, écrit des romans, enregistré deux CD. 

Nous nous sommes rencontrés au début de ma propre activité de blogueuse. Toute prévention était déjà tombée, d’autant que je partageais profondément son regard sur le monde et l’actualité. Il partageait aussi le mien sur l’islam. Le courant a  passé, nous avons même imaginé faire un jour une opération commune dans la Tribune. Jolie idée, vite oubliée.

La vie l’a peu épargné. Durant sept ans, pris dans une tourmente judiciaire suivie d’un acquittement, John a forgé une profonde réflexion sur le statut des hommes et des pères dans notre société. On comprend que le règne des féministes radicales et du féministe obsessionnel d’aujourd’hui a souvent passé par l’aiguise de sa plume. Frappé d’un cancer depuis une quinzaine d’années, il a connu plusieurs fois le scalpel, toujours convaincu des bienfaits de la naturopathie, tout en reconnaissant l’apport de la médecine moderne. C’est après une dernière opération qui s’était pourtant bien passée, qu’un voisin s’est inquiété de n’avoir plus de nouvelle. Un homme magnifique avait quitté ce monde.

Blog : Les hommes libres