« Les amputations? Mais sais-tu qu’il y a plusieurs avertissements avant? »

Comment des musulmans qui vivent depuis des décennies dans  dans nos sociétés, voire y sont nés, en arrivent-ils à défendre l’islam jusque dans ses pires aspects? Une longue discussion avec la sympathique Farah (prénom fictif) m’a sidérée.

Interviews: deuxième parution (10)

29.09.2013

D’origine marocaine, elle vit depuis une bonne vingtaine d’années en Suisse, à Genève. Elle a cinq enfants, dont deux étudient au Polytechnicum de Lausanne. C’est elle qui m’avait proposé cette entrevue lors d’une rencontre impromptue où elle avait remarqué mon hostilité à sa religion et ma méfiance envers ceux qui  la pratiquent assidument.

Elle me reçoit chez elle autour d’une tasse de thé durant près de deux heures. Elle semble convaincue qu’elle va me remettre sur la Voie. Vu qu’elle ignore que ses propos feront l’objet d’une publication, j’ai fait en sorte qu’elle ne puisse être reconnue.

C’est l’été. Elle est couverte de son foulard, le corps dissimulé (ni bras, ni jambes nues). Elle se montre chaleureuse, tout de suite à tu et à toi. Aucune question ne la fâche, sauf une suggestion à propos de la densité de Gaza: que les familles fassent moins d’enfants.  Cette idée la révuls!

Pour le reste, elle semble heureuse de son sort tout entier déterminé par sa foi, et se révèle très attachée à son prophète dont elle cite des passages tout à fait sympathiques.

Selon elle, la chose est claire: tout ce qu’ont dit Allah et Mahomet (elle répète la formule traditionnelle en arabe chaque fois qu’elle prononce son nom) est beau, humain, juste.

Pourquoi Dieu exige-t-il que les femmes portent un foulard ?

– La  chevelure est un élément de séduction. Les hommes ont des pulsions sexuelles bien plus fortes que les femmes.

Elle ne voit aucun rapport entre les interdits sexuels de l’islam et les affamés de la place Tahrir ou les harceleurs qui palpent les femmes. Pour elle, ces violeurs-harceleurs ne sont que de mauvais musulmans.

– Mais as-tu remarqué que dans nos sociétés où la mixité est la règle, où les  femmes s’habillent souvent de manière sexy, il n’y a pas de déchaînement sexuel, pas de harcèlement généralisé?

– Mais il y a bien plus de viols que dans les pays musulmans!

Je conteste, sans effet. Je lui parle des discriminations que subissent les femmes des pays musulmans, dont l’exigence d’obéir à un tuteur homme, y compris pour voyager. 

– En fait, ce que tu appelles discriminations à l’égard des femmes, ce sont des mesures destinées à deuxième parutionles protéger. Elles sont plus fragiles, moins fortes que les hommes. Elles peuvent être agressées. Je voyage parfois seule, mais je sais que je commets un péché. 

  – Ne trouves-tu pas ce verset méprisant: «Demandez le témoignage de deux témoins (…). Si vous ne trouvez pas deux hommes, choisissez un homme et deux femmes (…) Si l’une des deux femmes se trompe, l’autre lui rappellera ce qu’elle aura oublié…»

– Non. C’est vrai, les femmes sont plus légères, plus distraites que les hommes…

Elle n’aimerait pas d’un mari polygame…. Mais finit pas défendre la polygamie si les pulsions sexuelles de l’époux sont trop fortes. C’est préférable à des maîtresses. Elle est convaincue que les femmes sont très malheureuses en Occident, car beaucoup d’hommes ont des maîtresses. Et fort peu de femmes des amants.

 –  Et les violences, l’acide lancé contre les femmes insoumises, les persécutions des chrétiens, les guerres incessantes entre musulmans…?

– Ce sont des gens qui ne suivent pas l’islam.

C’est un  leitmotiv chez elle: l’islam étant parfait, si des musulmans se conduisent mal, c’est qu’ils s’écartent de son enseignement.

–  Mais tout de même! Mahomet lui-même a fait assassiner des opposants politiques, dont une mère de cinq enfants et un vieux poète, et des centaines d’hommes d’une tribu juive…

Ce n’est pas vrai! Tu te trompes! Mais pourquoi tu en veux tellement au Prophète ? Promets-moi d’essayer de comprendre…

Elle est aussi convaincue que Mahomet a fait disparaître l’esclavage. En fait, elle connaît très mal ses textes, se fiant à ce que lui disent ses imams. Et apparemment, ils puisent plus volontiers à des sources telles que le « Muhammad » de Tariq Ramadan, où le prophète  dégouline d’amour, de compréhension et d’empathie, que dans la biographie la plus connue (et reconnue), écrite par Ibn Ishak au VIIIe siècle. Là, les acte de Mahomet sont nettement plus cruels et sanglants. 

 – Mahomet a tout de même épousé une fille de 7 ans et consommé à 9. Depuis 14 siècles, suivant ce modèle, des filles sont  mariées enfants.

 – Ce que tu ne sais pas, c’est qu’au temps du Prophète, les gens étaient beaucoup plus grands que maintenant. Et les filles beaucoup plus vite pubères.

 – Allah et Mahomet ont dit: lapidation pour les adultères, exécution des homosexuels, des apostats, amputation des voleurs.

– Les amputations… Mais sais-tu qu’il y a plusieurs avertissements avant? Et pour qu’un adultère soit reconnu, sais-tu ce qu’exige la Loi?

– Oui, je sais, quatre témoins. Mais si la personne avoue? La femme qu’a fait lapider Mahomet avait avoué et demandé qu’il la punisse…

Ah ben voilà, il devait la lapider! Mais sais-tu ce qu’est la prison à vie? C’est horrible! Lapider, exécuter, ça signifie que la personne paie pour son acte et pourra alors être pardonnée.

Farah avance timidement que ces sanctions, de par leur radicalité, pourraient être des garanties de sociétés apaisées, exemptes de vols et d’adultères. J’avoue avoir de la peine à imagine cette sympathique femme approuver, dans la réalité, ces horreurs. Et pourtant…

Le discours au final n’est pas très cohérent et empli de convictions erronées. Mais il démontre que les imams genevois comme tant d’autres savent avec un art consommé instiller cet islam archaïque que pratiquent encore certains pays musulmans. Ces derniers ne sont logiquement jamais l’objet de critiques.